14 mai 2017, 18:36

FLESHDOLL

Interview Bastich

Blogger : Clément
par Clément

Quelques semaines après avoir lâché un cinquième album féroce et savoureux, le distributeur de mandales FLESHDOLL, représenté ici par son leader et vocaliste émérite Bastich, revient sur son parcours et évoque sans détour la suite à donner à ce dernier essai carnassier...


Salut Bastich, comment vas-tu ? J'imagine que tu profites des joies du climat toulousain ?
Salut Clément, ça va bien ! En revanche, je ne suis pas dans la région actuellement mais je n'ai pas à me plaindre de la météo puisque je suis en tournée aux Emirats Arabes Unis pour la régie technique d'un orchestre symphonique et la température tourne autour des 40 degrés ici !

« Hearts of Darkness », votre cinquième et dernier album, vient de voir le jour il y a quelques semaines maintenant... quelles sont les premières réactions que tu as reçu à son sujet ?
Les chroniques sont très élogieuses pour la plupart, certaines y voient d'ailleurs une sorte de consécration pour le groupe ! Cela fait plaisir parce qu'il nous semblait bien à l'écoute des bandes qu'on avait enfin atteint un palier mais ce qui nous surprend le plus, c'est que les fans de la première heure aussi sont bluffés et disent qu'on a franchi ce fameux cap. Bref, tout ça est vraiment bon pour le moral ! Encore !

Avez-vous joué avec FLESHDOLL certains de ces nouveaux titres récemment en live ?
Nous avons joué "Tanka", l'un des morceaux qui a le plus marqué les esprits pour l'instant et le très brutal "Silent Faces Of Stone". Il est vrai que nous changeons souvent nos set-list, d'ailleurs "Black Formulas" est déjà lui aussi dans les tuyaux pour mettre le feu au pit, il s'agit d'une reprise boostée aux hormones d'un titre de « WOARG » (sorti en 2005) et "Into The Abyss" devrait aussi faire son petit effet d'autant qu'il porte bien nos influences thrash old-school. Comme tu l'avais mis en avant dans ta chronique, nous avons également mis sur l'album notre version enflammée du cultissime "Into The Pit" de TESTAMENT. Un vrai bonheur que l'on balance souvent en live histoire de casser quelques nuques... et de rappeler d'où l'on vient.

En parlant de show, comment s’est déroulée la date que vous avez récemment effectué à Lyon en compagnie d’OTARGOS ?
Le concert à Lyon était excellent, avec une organisation aux petits oignons des locaux de DEATHAWAITS, qui sortent eux aussi un nouveau disque. Ce n'est un secret pour personne, nous aimons partager l'affiche avec des groupes comme OTARGOS, qui ne font pas dans la démonstration technique mais qui développent des ambiances malsaines. Cela colle bien encore une fois à notre état d'esprit old-school.
 

"La rencontre avec un instrument issu de la musique classique s'est tellement bien passée que nous n'excluons pas de reproduire l'expérience à l'avenir." - Bastich


Revenons à ce nouvel album : celui-ci est sombre, direct, technique, écrasant, voilà qui résume à merveille l’évolution du groupe depuis son premier album paru en 2005. Dans quel état d’esprit avez-vous abordé sa composition ? Avec quels objectifs par rapport aux quatre précédentes galettes ?
La composition et l'enregistrement nous ont pris moins d'un an, c'est peut-être pour cela qu'il parait si compact et au final... cohérent ? Nous savons tous exactement ce que nous voulons jouer aujourd'hui, il s'agit de la même ambition qui nous anime depuis le début de l'aventure, de plus le line-up est stable depuis « Blood Red District » ce qui nous aide à aller droit au but. Nos références ne viennent pas des groupes actuels mais plutôt des piliers qui ont fait le bonheur du metal extrême des années 1990 comme SUFFOCATION, DEATH ou MORBID ANGEL.

Qui s’est occupé de la composition de ces deux morceaux atmosphériques, "Octantis" et "At The Heart Of Darkness », qui apportent un peu de répit entre deux mandales brutal-death ?
Nous écrivons toujours des interludes, c'est aussi un héritage des années 90. J'espère que nos albums ne s'apprécient non pas comme des compilations fractionnés de chansons mais comme un déroulement sensé qui s'écoute du début à la fin avec un enchaînement logique de compositions. Je me creuse d'ailleurs toujours la tête sur l'ordre des titres dès les premières maquettes afin d'obtenir une véritable alchimie qui en découle...
Concernant "Octantis", il s'agit d'un duo entre Billy (guitare) et Estelle Richard (basson) qui permet de rester encore un peu plus dans la noirceur du morceau "Into The Abyss" qui le précède et de rendre la claque qui suit, "Blood Red Path", encore plus marquante. La rencontre avec un instrument issu de la musique classique s'est tellement bien passée que nous n'excluons pas de reproduire l'expérience à l'avenir.

La production est une fois de plus signée des Conkrete studios avec Mobo aux manettes. Qu’est-ce qui vous séduit dans son approche de producteur ? Tu peux nous en dire plus sur l’enregistrement ?
Et oui, il s'agit déjà de la troisième fois que nous faisons confiance à Mobo et nous avons obtenu exactement ce que nous voulions : c'est-à-dire un son empreint d'une tonalité old-school mais puissant, et la basse de Judas qui ressort bien dans le mix. D'après moi, Mobo est le meilleur producteur metal français. Le Conkrete Studio se déplace à domicile, il est donc possible d'enregistrer dans des conditions optimales et en profiter aussi pour passer de très bonnes soirées tous ensemble. Mobo nous connaît bien, il sait que nous serons toujours prêts à donner le meilleur de nous-mêmes pendant les prises.
Nous avons également trois invités sur l'album qui apportent un vrai plus et des idées qui ont elles aussi contribué à pimenter l'aventure une nouvelle fois. Josh de PROPHETIC SCOURGE assure un couplet au chant sur "Room 101", Mary de BLACK MARCH balance quelques phases sur "Into The Abyss" et Estelle joue du basson sur "Octantis".
Quant à Bill, il a joué du piano à queue sur la fin de "Tanka".

Passons à l’artwork, celui-ci est intriguant tout en conservant une imagerie occulte assez forte...
Nous avions confié l'artwork de l'album à Art Of Madness, qui est une jeune graphiste et tatoueuse rencontrée lors de l'Hell'Oween Festival (qui se déroule à Saintes (17)). J'ai pu travailler en totale complicité avec elle. Sans surprise, elle a réussi à créer exactement l'ambiance que nous recherchions, cet univers macabre qui colle à notre musique et ce bestiaire sorti du coeur des ténèbres.
 

"Je n'ai pas encore gagné un seul euro avec FLESHDOLL mais je ne mets pas ça sur le dos des nouveaux formats." - Bastich



 

Le clip de "Tanka" est très intrigant également, voire redoutable, comment s’est déroulé son processus de création ?
Pour ce clip, nous voulions quelque chose d'inhabituel, rien de plus qu'un film d'animation et donc, j'ai envoyé une proposition en priorité à Costin Chioreanu, qui possède un style unique. Il n'avait jamais réalisé de film pour un groupe de death aussi brutal que le nôtre mais il a adoré ce morceau et donc s'est emballé pour le projet. Le résultat est au delà de nos espérances, je retrouve beaucoup de thèmes de chacun des textes dans ses dessins et cela reste suffisamment subjectif pour laisser place aux interprétations. Ce mec est un tueur en graphisme et nous sommes fiers de rejoindre la liste impressionnante des groupes avec qui il a accepté de travailler (MARDUK, ENSLAVED, AT THE GATES, MAYHEM...)

Prenons un peu de hauteur. Cela fait maintenant 16 ans que FLESHDOLL existe et qu’il a apposé une empreinte forte sur la scène death tricolore. Quel regard portes-tu sur ces années passées ? 
Merci pour le compliment ! J'avais envie de proposer autre chose que les tendances de death metal moderne en créant le groupe, donc je suis content d'avoir rencontré un public qui nous plébiscite ! FLESHDOLL plait toujours plus à l'étranger qu'en France comme nous avons pu le constater lors de nos concerts au Maroc, un peu partout en Europe et au Japon mais peut-être que notre dernier album va nous permettre d'asseoir notre réputation live ici aussi.

Quel grand moment de l'existence de FLESHDOLL retiendrais-tu d'ailleurs ?
Tout pleins de souvenirs me reviennent comme la première partie de TESTAMENT à l'Xtreme Fest l'été dernier, la date sold-out à Tokyo en première partie de VOMITORY et BEYOND CREATION ou encore le millier de metalleux présents lors de notre tête d'affiche à Casablanca en 2006.


En plus de quinze ans, vous avez assisté au déclin du CD, à la résurrection du vinyl, à la redécouverte du format cassette, à l’omniprésence du digital, en quoi dirais-tu que cela a pu influencer en bien ou en mal l’évolution du marché de la musique, et plus particulièrement celui de la musique metal ?
Au delà de ce constat qui est juste, c'est que l'avantage quand tu joues un style aussi marginal que le nôtre c'est qu'aucun d'entre-nous n'a d'illusion sur les retombées financières que nous aurons... potentiellement. En revanche  notre public est majoritairement attaché au format physique, nous souhaitons donc toujours peaufiner les albums en les sortant en digipack 3 volets par exemple ou en vinyl. FLESHDOLL est aussi présent sur les plateformes digitales, si le monde entier peut nous écouter en deux clics, tant mieux...
Je n'ai pas encore gagné un seul euro avec FLESHDOLL mais je ne mets pas ça sur le dos des nouveaux formats, car nos albums se vendent bien mais nos dépenses dépassent de très, très loin nos gains.

JB Le Bail de SVART CROWN évoquait dans une interview réalisée pour HARD FORCE le grand saut que constituait le passage de Listenable à Century Media, même s’il restait prudent sur ses attentes, car même avec la meilleure promotion du monde, au final seul le public décide. Vous travaillez depuis plus de cinq ans avec Great Dane et sortez un troisième album chez eux aujourd’hui, même si cette collaboration semble fructueuse, n’avez-vous jamais été tenté de démarcher de nouveaux labels pour donner un second souffle à FLESHDOLL ?
Nous nous occupons de moins en moins de la partie business du groupe : c'est ingrat, chronophage, et cela demande un certain don pour le commerce qu'aucun de nous ne possède malheureusement. Great Dane nous propose de sortir l'album dans un beau format qui met bien en valeur l'artwork, et une bonne distribution internationale. Quoi demander de plus ?
Il nous manque cependant un manager efficace pour nous aider à négocier une signature ou de la promo mais JB a raison, c'est le public qui a le dernier mot.
Nous avons d'ailleurs refait une date avec SVART CROWN, c'est un véritable kif de jouer avec eux, cela serait énorme de partir plus longtemps sur la route ensemble comme nous l'avions fait il y a dix ans...

Revenons à nos moutons, ou plutôt à Toulouse ! J’évoquais la qualité et la vitalité de la scène toulousaine lors d’un échange avec Rico, guitariste du groupe NAIVE, quel est votre ressenti à ce sujet ?
Oui, nous n'avons pas à nous plaindre, Toulouse reste un vivier très actif en concerts et soirées grâce à des asso comme SPM par exemple, des nouveaux groupes se forment continuellement, et certains sortent bien du lot comme BLOOD AGES.
La mairie pose problème en ce moment et rend l'organisation de "petits" concerts difficiles à cause de restrictions contre les bars et cafés-concerts mais ce n'est qu'une mauvaise passe comme cela est déjà arrivé par le passé. Il y a trop de chevelus toulousains pour que la scène locale se fatigue !

Nous voici à la fin de cet échange, Bastich, ces derniers mots seront les tiens, merci pour ta disponibilité et à bientôt sur les routes de France et de Navarre !
J'appelle tous les metalleux de l'underground français à jeter une oreille sur notre dernier album !
Et si celui-ci vous botte le cul, n'hésitez pas à le faire savoir car nous avons plus que jamais besoin de votre aide, c'est devenu vital ! Si vous connaissez un lieu qui peut nous faire jouer faites-le nous savoir... même s'il ne paie qu'en bourbon frelaté, nous y réfléchirons quand même !
Merci à toute l'équipe de HARD FORCE pour le soutien, see you Into The Pit !


Blogger : Clément
Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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