8 août 2023, 23:59

ORANGE METALIC FESTIVAL - MEGADETH + AIRBOURNE + TRIVIUM + CARPENTER BRUT

@ Orange (Théâtre Antique)


La dernière fois que le Théâtre Antique d'Orange avait accueilli un concert de hard rock avant la 1ere édition de l'Orange Metalic Festival l'année dernière, avec WITHIN TEMPTATION, EPICA et BEAST IN BLACK, c'était en 1981. Et pas n'importe lequel puisque l'on parle de TRUST, en mode bulldozer sur la tournée “Marche ou crève”, accompagné en première partie d'IRON MAIDEN en plein “Killers World Tour”. La dernière tournée avec Paul Di'Anno, qui sera remplacé par Bruce Dickinson avant que Nicko McBrain, à l'époque batteur de TRUST, rejoigne la Vierge de Fer et que Clive Burr enregistre « Trust IV ». Un bien bel exemple d'échangisme musical ou je ne m'y connais pas. Et, comme on dit, le reste appartient à l'Histoire.

Le photographe qui m'accompagne était présent en ce 1er septembre, il y a 42 ans, et se souvient avec une pointe de nostalgie (mais sans radio) que le superbe site désormais vieux de 22 siècles était nettement moins rempli que ce soir. Car même si le festival n'affiche pas complet, on n'en est pas loin, le public étant installé jusqu'en haut des gradins dans l'hémicycle.

Présenté comme l'artiste d'ouverture sur les affiches, Carpenter Brut clôturera en fait la soirée et c'est TRIVIUM qui ouvre les hostilités à 18h30. Un peu surprenant de voir une formation de ce calibre passer en premier mais contrairement aux Français, ils n'ont pas besoin de jouer de nuit pour déployer leur son et lumières. De toute façon, leur show est comme toujours très efficace, avec ou sans lights. Dommage qu'ils n'aient pas été franchement gâtés au niveau du son, d'autant plus que les trois autres groupes bénéficieront d'une acoustique parfaite. Tandis qu'Alex Bent martèle ses fûts, à la basse, on note la présence d'un chevelu gaucher en lieu et place de Paolo Gregoletto, le bassiste. Opéré en urgence d'une hernie quelques jours plus tôt, il est convalescent et c'est Josh Baines, guitariste de MALEVOLENCE, qui joue les intérimaires. L'Anglais, contacté à la dernière minute, fait bien le job même si les chœurs toujours chiadés de Paolo manquent forcément un peu.


Difficile en une heure de jouer tous les morceaux forts d'une discographie de 10 albums, mais TRIVIUM, emmené par Matt Heafy, le frontman nice guy, efficacement secondé par Corey Beaulieu, le guitariste screamer, déroule une setlist variée : “A Gunshot To The Head Of Trepidation”, au cours duquel il grimpe sur la crash barrière pendant le solo, “Down From The Sky” pour les plus anciens morceaux et, pour les plus récents, “Strife”, “The Heart From Your Hate” et, bien sûr, l'incontournable “In Waves” en point d'orgue. Et dont tout fan qui se respecte gueule le refrain à s'en faire péter les tympans. Même si les Américains continuent à ne pas être reconnus à leur juste valeur, les spectateurs présents n'étaient pas là par hasard et leur ont réservé un accueil chaleureux bien mérité.


“Creeping Death”, “Run To The Hills”, puis une portion de “Ace Of Spades” retentissent dans la sono qui vient de monter d'un cran. Il n'y a pas à dire, AIRBOURNE sait faire grimper la température. Et là, sans le moindre avertissement, c'est une tornade qui s'abat sur le Théâtre Antique sous le regard de l'Empereur Auguste qui domine la scène. Les Australiens ont mis un jour les doigts dans la prise et ils ne les ont plus jamais jamais enlevés. A moins qu'ils ne soient tombés dans la marmite de cette potion magique qu'est le rock'n'roll à haute tension quand ils étaient petits et en gardent d'inaltérables “séquelles”. En plus de 35 ans de concerts, j'ai rarement vu une telle débauche d'énergie sur scène et il est totalement impossible de ne pas être happé par le courant alternatif et continu aimablement fourni par les quatre hommes.

Il faut dire que leur hard rock, qui rappelle évidemment dans les grandes lignes un AC/DC très énervé avec un Bon Scott survolté en la personne de Joel O'Keeffe, s'y prête particulièrement bien. Le son est très fort mais clair (tous les 3-corps Marshall sont branchés et pas juste là pour faire joli), les spectateurs presque aussi déchaînés que les musiciens, et le bassiste Justin Street et le guitariste Brett Tyrrell, en activité depuis le juin dernier, passent leur temps à traverser la scène en courant pour échanger leur place, tout en évitant soigneusement leur frontman toujours en mouvement. Sans oublier, dans le rôle du métronome humain, Ryan, le petit frère de ce dernier. 

Passé maître dans l'art du lancer de gobelets de bière dans le public, Joel, qui fendra la foule sur le dos d'un roadie tout en jouant (tiens, j'ai déjà vu ça quelque part), fera une pause au milieu du concert quand un roadie lui apporte un flycase sur lequel est inscrit Lemmy's Bar avec Snaggletooth, la mascotte de MOTÖRHEAD. Dessus sont posés une bouteille de Jack Daniel's et du Coca – la formule du célèbre Lemmy's Cocktail – clin d'œil à l'inoubliable bassiste/chanteur. Avant de repartir aussi frénétiquement, malgré une “botte de marche” au pied droit qui laisse supposer qu'il souffrait encore il y a peu au minimum d'une entorse. Ce qui ne l'empêchera pas non plus de parcourir la scène au pas de l'oie… Pour paraphraser la célébrissime scène du restaurant du film Quand Harry rencontre Sally : « Donnez-moi la même chose que lui » (si c'est légal s'entend). AIRBOURNE nous régale d'une heure placée sous le signe du rock avec des titres comme “Ready To Rock”, “Too Much, Too Young, Too Fast” et son riff que n'aurait pas renié Malcolm Young, “Girls In Black”, “It's All For Rock'n'Roll”… Le rock'n'roll électrique n'est décidément pas une pollution sonore, comme le chantait si bien Brian Johnson en 1980 – époque à laquelle les membres d'AIRBOURNE n'étaient pas encore nés. Mais on peut leur faire confiance pour continuer à brandir fièrement le flambeau.


Tout est relatif tant les deux genres musicaux sont différents, mais quand, 30 minutes plus tard, MEGADETH ouvre son set par le formidable “Hangar 18” et son orgie de solos de guitares, il faut quelques instants pour oublier AIRBOURNE. Le son, très bon, est moins fort, les musiciens, évidemment, bougent peu mais ce n'est pas ce que l'on attend d'eux. C'est Dave Mustaine et ses hommes qui sont là. Une légende du thrash, une de ses plus grandes figures, grand guitariste, grand riffer… et grande gueule aussi. Arrogant, entier, parfois despotique mais doué et droit dans ses bottes. Sur une scène aussi belle que dépouillée car uniquement composée d'une mosaïque d'écrans en fond de scène et tout autour de la “niche” dans laquelle Dirk Verbeuren met la pâtée à son kit pendant que le revenant James LoMenzo fait tourner la baraque, le concert d'une heure 25 passe en revue les grandes périodes de MEGADETH. De “Wake Up Dead” à “Sweating Bullets”, en passant par “Dystopia”, “In My Darkest Hour”, “Trust” et “Angry Again”. Etonnamment, “We'll Be Back!” sera le seul rescapé de leur dernier LP en date, « The Sick, The Dying… And The Dead! » (2022). Mais sans dire que ce 16e album fait pâle figure à côté des “classiques” du groupe, aucune de ses chansons ne peut de toute façon rivaliser avec “A Tout le Monde” (repris évidemment en chœur par tous les spectateurs), “Symphony Of Destruction” ou “Peace Sells”.


Dommage que les solos du virtuose Kiko Loureiro n'aient pas été un peu plus forts, à part sur “Tornado Of Souls” sur lequel Marty Friedman posa ce qui est certainement le plus beau solo de sa carrière. Et sur lequel Mustaine cède le micro à Matt Heafy. Juste avant le concert, un “insider” m'avait en effet indiqué que MegaDave étant malade, le frontman de TRIVIUM pourrait venir à la rescousse pour lui permettre de récupérer un peu. De tous les concerts que j'ai vus au fil des années, ce sera pourtant selon moi la fois où il aura le mieux chanté. Sans doute parce qu'obligé de préserver sa voix, il n'a pas eu tendance à forcer, ce qui lui donne cette tonalité nasillarde un peu déplaisante qui la caractérise souvent en live. Il n'y a que quand il s'adresse au public que l'on s'aperçoit que oui, il est à la peine et un peu diminué. Ce qui ne l'empêchera pas d'assurer. Très fier de l'honneur qui lui est fait, Heafy, qui chante tout en lisant les paroles sur l'un des trois prompteurs placés face à la scène, s'en sortira avec haut la main. Et réalisera au passage un de ses rêves de gosse.
Le concert terminera avec un autre morceau qui a donné ses lettres de noblesse au thrash, “Holy Wars… The Punishment Due”, unique rappel de ce très bon concert de MEGADETH.


C'est donc Carpenter Brut qui a la charge de jouer en dernier. Après sa prestation sur la Mainstage 1 du Hellfest 2023 retransmise sur Arte, le meilleur représentant du synthwave metal français (mais y en a-t-il d'autres ?), dont la cote de popularité aux quatre coins du globe ne cesse de grandir, n'est pas une erreur de casting. Il est vrai qu'un certain nombre de spectateurs ne goûtent que moyennement à cet hybride musical et le fait que le chant soit samplé est assez déroutant, par exemple. Mais bien que synthétique à la base, le style de la créature de Franck Hueso, claviériste et maître à penser du projet, demeure organique grâce aux deux métalleux qui l'accompagnent, le guitariste Adrien Grousset d'HACRIDE et le batteur Florent Mercadet, batteur d'HACRIDE et ex-KLONE. Quant au spectacle visuel sur les écrans, ses images collent parfaitement aux ambiances. Cela posé, je ne vais pas faire semblant de connaître Carpenter Brut que je n'ai écouté que quelques jours avant le festival, histoire de savoir à quoi m'attendre. Et même si je n'écouterai pas leur musique en boucle, j'ai passé un bon moment.


Terre de soleil, mais plutôt mal barré en termes de concerts de metal d'envergure, le Sud-Est peut désormais s'enorgueillir de deux festivals, qui plus est dans des cadres exceptionnels : celui des Arènes de Nîmes, qui s'étend sur plusieurs semaines et propose une programmation aussi éclectique qu'éclatée puisqu'à chaque fois, ce ne sont que deux groupes qui se produisent par soirée (cf. SLIPKNOT/SLEEP TOKEN et GOJIRA/AVATAR il y a un peu plus d'un mois). Et désormais l'Orange Metalic Festival, une réussite à tous les niveaux. Pas le moindre retard, une excellente affiche et un public conquis. Vivement la 3e édition ! 

Les setlists

Photos © Chris Cap - Portfolio
 

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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