21 mars 2024, 19:34

HABITANTS

"Alma"

Album : Alma

Après le très réussi « One Self » (2018), c’est à l’automne 2020 que le groupe HABITANTS refait surface avec une nouvelle chanson qui annonçait alors l’arrivée prochaine d’un nouvel album. A cette époque, Géma Perez (guitariste et fondatrice du groupe avec les frères Rutten) nous avait révélé ne pas vouloir se précipiter pour sortir l’album dans un contexte encore incertain juste après la pandémie. La stratégie était alors de sortir un single tous les trois mois pour entretenir la flamme autour du groupe avant de publier l’album à l’automne 2021. Et puis plus rien, jusqu’à récemment où deux nouveaux singles ont annoncé sa parution. 

Sans surprise, HABITANTS confirme qu’il s’inscrit dans une vision moderne du genre trip-rock dans lequel il imprime sa marque. A l’écoute de « Alma », il est difficile de ne pas ressentir l'affiliation avec THE GATHERING. La présence de René Rutten n’y est certainement pas étrangère, mais pas que, puisque nous retrouvons à la production Attie Bauw qui a aussi produit le dernier album de THE GATHERING. Néanmoins, c’est pour le meilleur car HABITANTS confirme qu’il est une entité solide avec laquelle il va falloir compter !

« Alma » vous invitera à un voyage intérieur pour d’explorer la complexité de l'existence humaine dans toutes ses dimensions. A travers ses neufs titres, « Alma » propose un mélange intriguant de rock alternatif, de trip-rock et de dark-wave. L’association de la voix éthérée et enchanteresse de la chanteuse Anne van den Hoogen (ROSEMARY & GARLIC), et la réverbération envoûtante de la guitare de René Rutten propose des mélodies à la fois atmosphériques, grandioses et mélancoliques, qui permettent à HABITANTS de guider l’auditeur vers des mondes surréalistes. « Alma » qui signifie âme en espagnol, raconte l'histoire d'une femme aux prises avec les divers aspects de son être. Cette dynamique, qui oscille entre vulnérabilité et force, est reflétée de manière ludique par de nombreuses couches vocales et de sons de guitare. Simultanément, elle expose avec franchise ses luttes intérieures.

Cette introspection commence par ''Highways''. Ce titre est introduit par un battement de cœur accompagné d’un arpège sur lequel Anne vient poser une ligne de chant sombre et inquiétante, ce qui est inhabituel pour une chanteuse dont la voix est plutôt apaisante. La seconde partie plus rythmée laisse transparaître la révolte d’une femme qui se désespère en voyant la manière dont ses semblables traitent la planète qui nous nourrit et sans laquelle toute existence est impossible. Le pont qui permet un temps de réflexion, reprend le rythme, amplifié par les nappes de claviers. Chargé d’émotion et d’amertume, ce dernier couplet fait le constat que malgré une prise de conscience individuelle, nous sommes collectivement piégés, tel l'animal tétanisé et aveuglé dans les phares du véhicule qui s'apprête à le percuter.

Avec ''Youth'', on reste sur quelque chose de rythmé, mais plus apaisant. Sur cette chanson, on imagine que cette femme se remémore avec nostalgie l’époque où l’insouciance de la jeunesse lui permettait de surfer sur les vagues de la vie. Sur le même modèle, ''Future You'' propose une ligne musicale et vocale tout en relief où l'insouciance de la jeunesse est celle de la découverte de l’amour. 

Lorsque résonnent les premières notes du single ''Cod Fishing'', on change de registre. Le tempo lent est chargé de tristesse, et du chant se dégage le regret qui exprime la honte que l’on peut ressentir. Dans la continuité, ''Morgen'' propose une version plus aboutie que celle parue fin 2020. Il est question ici d’introspection et d'interrogation face au deuil d’un amour que l’on pensait immuable mais qui, face à l’usure du temps, se désagrège et finit par appartenir au passé. La séquence ''Alma'' et ''If I Knew'' est la partie de l’album la moins facile à aborder. Elle nécessite de faire le vide et de se concentrer uniquement sur les titres. C’est le moment où le voyage intérieur touche au plus intime de l’être. C’est celui où le personnage que nous suivons plonge dans un océan de solitude. Elle en émerge sur une note d’espoir avec ''The Waiting Room'' plus dynamique, où elle s’interroge sur son humanité. 

Pour ceux qui auront le CD en main, vous pourrez bénéficier en bonus du titre ''Bury The Earth'', initialement sorti en octobre 2020 pour annoncer l’album, il est aérien chargé d’émotion et de tristesse. A l’image de ''Highways'', la chanson aborde le sujet du changement climatique. L’esprit semble ici toutefois plus résigné.

Ce second album confirme que HABITANTS n’était pas juste le projet des frères Rutten de renouer avec la musique. René faisant toujours partie de l’aventure, HABITANTS est une entité à part entière qui bénéficie d’un line-up stable et soudé, composé de musiciens confirmés et de compositeurs talentueux. Associé au producteur Attie Bauw, le groupe signe un excellent album qui inscrit HABITANTS dans le présent et lui confère un avenir. S’il est indéniable, que la présence de René et de Attie insuffle à cet album une part de l’esprit de THE GATHERING, à aucun moment nous ne tombons dans le plagiat. Au contraire, avec la voix d’Anne van den Hoogen, HABITANTS propose une facette tout à fait personnelle. En n'hésitant pas à sortir de sa zone de confort, elle délivre des lignes de chant desquelles transparaît un subtile mélange d’intonations qui font écho à Anneke van Giersbergen, Elizabeth Fraser ou encore Tori Amos. Il ne vous reste donc plus qu’à découvrir cet album afin de vous faire votre propre opinion.

Blogger : Bruno Cuvelier
Au sujet de l'auteur
Bruno Cuvelier
Son intérêt pour le hard rock est né en 1980 avec "Back In Black". Rapidement, il explore le heavy metal et ses ramifications qui l’amèneront à devenir fan de METALLICA jusqu'au "Black Album". Anti-conformiste et novateur, le groupe représente à ses yeux une excellente synthèse de tous les styles de metal qui foisonnent à cette époque. En parallèle, c'est aussi la découverte des salles de concert et des festivals qui le passionnent. L'arrivée d'Anneke van Giersbergen au sein de THE GATHERING en 1995 marquera une étape importante dans son parcours, puisqu'il suit leurs carrières respectives depuis lors. En 2014, il crée une communauté internationale de fans avant que leur retour sur scène en juin 2018 ne l'amène à rejoindre HARD FORCE. Occasionnellement animateur radio, il aime voyager et faire partager sa passion pour la musique.
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1 commentaire

User
cyril Agarock
le 23 mars 2024 à 12:15
Merci pour cette chronique à laquelle j'adhère à 100 % - je suis un grand Fan de THE GATHERING, et notamment des productions de René Rutten, donc forcément, j'attendais impatiemment ce nouvel album de HABITANTS qui ne déçoit absolument pas, bien au contraire. Encore de magnifiques titres avec en point d'orgue HIGHWAYS que je trouve tout simplement prodigieux. J'ai également adoré FUTURE YOU et IF I KNEW - mais globalement, ce nouvel album est sublime, et au moins aussi bon que le précédent.
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